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Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/319

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une horrible imprécation mise dans la bouche du héros de la pièce, il lui survint dans le gosier Dieu sait quel empêchement qui provoqua une quinte de toux si atroce et si opiniâtre, qu’on l’emporta hors du salon à demi mort.

La présidente, qui depuis longtemps dissimulait mal son ennui, ne fut que légèrement affectée de cette interruption imprévue. Dès que l’ordre fut rétabli dans la compagnie, elle demanda s’il ne serait pas à propos, non plus de lire, mais de raconter verbalement quelque histoire dramatique, et elle ajouta qu’Euchar était pour ainsi dire dans l’obligation de donner cette satisfaction à la société, lui qui par son habituelle taciturnité, contribuait si peu à l’amusement général.

Euchar déclara avec modestie qu’il était un très mauvais narrateur, et que d’ailleurs le meilleur de ses récits serait sans doute trop sérieux, et peut-être même si excessivement sombre, qu’il doutait qu’on prît plaisir à l’entendre. Mais aussitôt quatre demoiselles fort jeunes s’écrièrent à la fois : « Oh, du sombre ! oh oui, du terrible ! oh, qu’il y a de plaisir à se sentir frémir !… »

Euchar s’assit donc en face des dames, et il commença ainsi :

Nous avons passé par une époque fatale, ouragan furieux qui s’est déchainé sur la terre, et au milieu duquel la nature humaine, ébranlée dans ses plus intimes profondeurs, a produit des monstruosités cachées, de même que la mer soulevée par la