Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/324

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déjà défiait hardiment l’impuissant courroux de ses oppresseurs.

Edgar fut fidèle à sa promesse. Il réussit à tromper la vigilance d’une police ombrageuse et à passer en Angleterre avec Baldassare de Luna. Mais le destin ennemi ne laissa pas au vieux et vaillant soldat la satisfaction de revoir sa patrie. Retombé malade de nouveau, il mourut à Londres dans les bras d’Edgar. À ses derniers moments, un esprit prophétique lui fit entrevoir le triomphe prochain de l’Espagne affranchie ; et à la prière suprême que murmuraient péniblement ses lèvres glacées par l’approche de la mort, Edgar l’entendit mêler le mot Vittoria ! tandis que sur ses traits radieux éclatait une pure et céleste béatitude.

Ce fut précisément à l’époque où l’armée victorieuse de Suchet menaçait d’anéantir les derniers soutiens de l’insurrection nationale et d’appesantir pour jamais sur l’Espagne le joug honteux de la domination étrangère, qu’Edgar arriva devant Tarragone avec la brigade du colonel anglais Sterret. On sait que cet officier trouva la place dans une situation trop critique pour risquer un débarquement. Mais le jeune Allemand, avide de chances périlleuses, ne put se résoudre à partager cette inaction. Il quitta les Anglais et parvint à pénétrer dans la ville, défendue par le général espagnol Contreras avec huit mille hommes des meilleures troupes espagnoles. On sait encore que, malgré la plus énergique résistance, les troupes françaises prirent Tarragone d’assaut, et que Contreras lui-même, blessé d’un