Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/326

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agonisants. Il parvint à se lever et à se trainer loin de là. Aux premières lueurs de l’aurore, il se trouva à l’entrée d’un défilé profond, et il commençait à y descendre, lorsqu’il aperçut une troupe de cavaliers ennemis qui le gravissait lentement. Il lui paraissait impossible de se soustraire cette fois à la captivité ; mais tout-à-coup des coups de feu partis de l’épaisseur des buissons, étendent morts quelques-uns des cavaliers, et une troupe armée de guérillas se précipite sur les autres. Edgar appelle à haute voix en espagnol ses libérateurs, et il est accueilli avec joie. Il n’avait reçu qu’une forte éraflure dont il fut promptement guéri, de sorte qu’il put se joindre au corps d’armée de don Joachim Blake, qui, après plusieurs combats successifs, parvint à entrer dans Valence.

Qui ne sait que la plaine arrosée par le Guadalaviar, où Valence élève avec orgueil ses tours superbes, peut s’appeler un vrai paradis terrestre ? La constante sérénité du ciel, le charme divin d’une nature magnifique se reflètent dans les mœurs de ses habitants pour qui la vie est une fête perpétuelle. Et cette belle Valence était alors la place d’armes, le foyer de la guerre dévastatrice ! Au lien des doux refrains d’amour qui troublaient seuls autrefois le silence des nuits, au lieu des langoureux soupirs qui montaient vers les balcons aux jalousies entr’ouvertes, on n’entendait plus que le sourd roulement des canons, des caissons de poudre, les cris farouches des sentinelles, le murmure sinistre des bataillons se croisant dans les rues. Toute idée de plaisir