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Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/335

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la mort se peignait un désespoir inconsolable ; il tremblait et parut sur le point de défaillir quand il se vit en face de l’Empecinado. Celui-ci le perçait de son regard flamboyant ; et après un court moment de silence, il prit la parole avec un calme sinistre et fait pour glacer de terreur.

« Antonio, dit-il, vous êtes entré en intelligence avec l’ennemi, vous vous êtes rendu chez Suchet plusieurs fois à des heures indues, et vous avez ourdi le dessein de livrer le secret de nos retraites dans la province de Cuença.

— J’en conviens ! » dit Antonio avec un douloureux soupir et sans redresser sa tête penchée.

L’Empecinado s’écria alors avec l’accent farouche d’une ardente colére : « Se peut-il bien que tu sois un Espagnol, et que le véritable sang de les aïeux coule dans tes veines ? Ta mère n’était-elle pas la vertu en personne ? Si ce n’était charger sa mémoire d’une flétrissure infâme que de supposer un seul instant qu’elle ait pu faire tache au vieil honneur de sa maison, je croirais que tu es un bâtard, un rejeton impur de la plus ignoble race qui soit au monde ! — Tu as mérité la mort : prépare-toi à la subir. »

Alors Antonio se jeta en gémissant aux pieds de l’Empecinado et s’écria à haute voix : « Mon oncle ! mon oncle ! ne croyez-vous pas que toutes les furies de l’enfer me déchirent la poitrine ? Ayez pitié de moi, je vous en conjure ! Songez combien est grande la puissance fatale du démon. Oui, mon oncle, je suis un Espagnol : laissez-moi le prouver ! accordez-