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Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/336

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moi cette grâce ! permettez-moi d’effacer dignement le déshonneur, l’opprobre jeté sur moi par les artifices de Satan ; que je puisse me réhabiliter à vos yeux, à ceux de mes frères ! Mon oncle ! vous me comprenez, vous savez la grâce que j’implore de vous ? »

L’Empecinado parut touché des supplications du jeune homme ; il le releva et dit d’un ton presque affectueux : « Tu as raison, la malignité du démon exerce un grand empire. Ton repentir est vrai, il doit l’être : je sais quel est l’objet de tes supplications. Je te pardonne, fils de ma sœur bien-aimée, viens sur mon cœur ! » — L’Empecinado détacha lui-même les liens du jeune homme ; et après l’avoir tendrement serré dans ses bras, il lui tendit le poignard qu’il portait à sa ceinture. « Merci ! » s’écria l’autre. Puis il baisa, les yeux baignés de larmes, la main de son oncle, leva vers le ciel un regard pieux, s’enfonça profondément le poignard dans le cœur et tomba sans proférer un cri.

Cette scène ébranla Edgar encore souffrant à un tel point qu’il faillit s’évanouir. Le père Eusebio le ramena dans son lit.

Au bout de quelques semaines, don Rafael Marchez crut pouvoir sans danger faire sortir Edgar de cette sombre retraite, peu propice à sa parfaite guérison. Au sein de la nuit il le fit monter dans une chambre écartée dont les fenêtres donnaient sur une rue à peu près déserte ; et il lui recommanda sur toutes choses de ne pas franchir le seuil de sa porte,