Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/346

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contre un Français, sans lâcher les rênes d’un mulet qu’il avait prises entre ses dents. En ce moment même, et avant qu’Edgar fût à portée, le Français renversa le petit en le frappant d’un poignard qu’il lui avait probablement arraché, et il s’efforçait déjà d’entraîner le mulet dans la profondeur du bois. Edgar jette un cri, le Français tire sur lui et le manque ; Edgar se précipite et lui passe sa baïonnette au travers du corps. Le petit homme gémissait pitoyablement ; Edgar le releva, lui fit lâcher non sans peine les rênes qu’il avait mordues convulsivement ; et ce ne fut qu’en voulant le placer sur le mulet, qu’il aperçut assise dessus une figure humaine enveloppée d’un manteau et gémissant faiblement, qui tenait entre ses bras le cou de l’animal. Ce devait être une jeune fille, à en juger à sa voix. Edgar plaça alors le petit homme blessé derrière elle ; il saisit les rênes du mulet, et il regagna ainsi le lieu du campement, où Isidore Mirr était déjà rendu avec ses camarades, n’ayant plus trouvé d’ennemis à combattre.

On descendit de dessus le mulet le petit homme, que la perte de son sang avait fait évanouir, bien que la blessure ne fût pas mortelle, et après lui la jeune fille. Mais tout à coup, don Rafael s’élance hors de lui-même, en criant à haute voix : « Mon enfant !… mon cher enfant ! » Et il voulait serrer dans ses bras la petite fille qui paraissait avoir de huit à dix ans ; mais lorsqu’à la lueur brillante des torches il reconnut la figure d’Edgar, il se précipita à ses genoux en s’écriant : « Ô don Edgar !