Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/388

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sous la condition expresse que chaque convive adopterait pour ce jour-là le costume exact de l’année 1760. Les jeunes gens pour qui il eût été embarrassant de se procurer de semblables habits, pouvaient librement disposer de la garde-robe bien fournie du conseiller. Il était évident que celui-ci n’avait d’autre but que de mener joyeuse vie durant les trois jours consacrés à cette fête, en réminiscence de l’heureux temps de sa jeunesse.

Ernest et Willibald se rencontrèrent dans une allée écartée. Tous deux s’examinèrent quelques moments en silence, et partirent ensuite d’un fol éclat de rire. « Tu m’as l’air, s’écria Willibald, du chevalier désespéré, cherchant à retrouver sa route dans le labyrinthe d’amour. »

Et Ernest répliqua : « Il me semble voir en toi un des héros de l’astrée.

» Mais vraiment, reprit Willibald, l’idée du vieux conseiller n’est pas si mauvaise. Il veut absolument se mystifier lui-même, et ressusciter comme par magie une époque où il vivait réellement, bien qu’encore à présent, vieillard alerte et vigoureux, il jouisse de la santé la plus robuste et d’une étonnante vivacité d’esprit, au point qu’il surpasse en énergie et par sa fraîcheur d’imagination plus d’un jeune homme énervé avant l’âge. Du reste, il n’a pas à craindre que quelqu’un de ses convives démente ici son costume par ses gestes ou son langage ; car de pareils vêtements rendent assurément la chose tout-à-fait impossible. Vois un peu comme nos jeunes dames se dandinent avec grâce et coquetterie