Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/612

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un portier grondeur, qui ronflait à plaisir depuis deux heures au moins, et à lui faire à moitié comprendre qu’on pouvait avoir la fantaisie de se promener à minuit sans être absolument en démence, je me trouvai enfin dans la rue.

En passant devant l’église des jésuites, j’aperçus de la lumière briller à travers une fenélre. Je trouvai la petite porte latérale entrebaillée, j’entrai, et je vis qu’on avait allumé un flambeau posé en face d’une niche devant laquelle j’aperçus, en m’approchant, un grand filet tendu verlicalement, et derrière le filet une figure dans l’ombre qui montait et descendait les degrés d’une échelle, et paraissait peindre quelque chose dans la niche. C’était Berthold qui marquait d’une trace noire sur la muraille toutes les lignes d’ombre projetées par le filet. À peu de distance, sur un grand chevalet de peintre, était posé le dessin d’un autel. Je restai dans la contemplation de cet ingénieux procédé. Pour peu que tu sois familiarisé, lecteur bénévole, avec le noble art de la peinture, tu devines aisément à quoi servait ce filet dont Berthold accusait les compartiments sur la concavité du mur. Il avait à peindre dans la niche un autel en saillie. Or, pour rendre exactement son grand dessin conforme au modèle en petit, il devait, d’après la méthode ordinaire, transporter son croquis sur la surface qu’il fallait peindre au moyen du filet appliqué sur ce plan. Mais ici, au lieu d’une surface plane, c’était une niche cintrée qui était à peindre, et ce procédé aussi simple qu’ingénieux, au moyen duquel