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Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/620

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que cela pourra devenir quelque chose de passable ! J’ai visé, du moins, à la correction du dessin. — Mais impossible de continuer à présent. — Pas un coup de pinceau de plus, cher Berthold ! il est presque incroyable que vous ayez pu avancer autant un pareil ouvrage en si peu d’heures, mais vous vous fatiguez trop et vous abusez de vos forces.

» Et cependant, répartit Berthold, ce sont là mes heures les plus heureuses ! — Peut-être ai-je un peu trop bavardé ; mais la douleur déchirante qui ronge le cœur s’épanche malgré nous par la parole.

» Vous paraissez livré à un profond chagrin, mon pauvre ami ! lui dis-je. Le repos de votre vie a dû être compromis par un événement terrible, quel qu’il soit. »

Le peintre porta lentement ses ustensiles dans la sacristie, puis il éteignit le flambeau, et s’avançant alors vers moi, il me dit d’une voix tremblante, en me serrant la main : « Pourriez-vous jouir d’un seul moment de repos ou de gaîté si vous aviez la conscience chargée d’un crime abominable et que rien n’expiera jamais ? » — Je restai pétrifié. Les premiers rayons du soleil éclairaient vivement son visage défait et couvert d’une pâleur mortelle ; il ressemblait vraiment à un spectre, en s’en allant d’un pas chancelant par une petite porte qui menait dans les cours du collège.

À peine le lendemain pus-je attendre l’heure à laquelle le professeur Walter m’avait donné rendez-vous. Je lui racontai toute la scène de la nuit précédente, dont j’étais encore singulièrement ému. Je lui dépei-