Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/646

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leva, il croyait rêver, il regarda fixement sa compagne : oui c’était bien elle ! l’apparition divine et séduisante qui avait allumé en lui le feu sacré. « Est-ce possible ! s’écria-t-il, est-il vrai ? suis-je encore vivant ? — Oui, tu vis, lui dit la princesse, tu vis pour moi ! ce que tu n’osais espérer se trouve accompli par un miracle. Oh ! je te connais bien. Tu es le peintre allemand Berthold, tu m’aimes, et tu as voulu illustrer l’objet de ton amour en retraçant mes traits dans tes plus beaux tableaux… Je ne pouvais t’appartenir... mais à présent je suis à toi, à toi pour toujours et sans réserve. Fuyons ! oh, fuyons. »

Une sensation étrange traversa l’âme de Berthold à ces paroles de la princesse, comme si une douleur subite fût venue anéantir ses rêves les plus doux. Mais lorsqu’il sentit les bras d’albâtre de cette femme ravissante le presser tendrement, lorsqu’il la serra contre son cœur, alors saisi d’un frissonnement de bonheur inconnu, pénétré d’une indicible volupté, il s’écria : « Oh ! ce n’est point une illusion, un rêve ! Non ! c’est ma femme chérie que j’embrasse, c’est elle qui vient combler les brûlants désirs de mon cœur, et nous ne devons plus nous séparer ! »

Il ne fallait pas songer à sortir de Naples, car l’armée française entourait la ville, que le peuple, à peine armé et sans aucuns chefs, défendit pourtant deux jours entiers. À la fin Berthold, se réfugiant de cachette en cachette, parvint à s’enfuir avec Angiola, qui, n’écoutant que son ardent amour pour son libérateur, n’hésita pas à quitter tout-à-fait l’Italie.