Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/734

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un choral de voix de femmes. C’était un ouvrage du musicien. L’harmonie de cette musique, que semblaient chanter dans le ciel les chérubins et les séraphins, simple, et pourtant empreinte d’un caractère vraiment idéal, me rappela vivement maintes compositions sacrées que j’avais entendues deux cents ans plus tôt en Espagne et en Italie, et je me sentis agité comme alors d’un pieux frémissement. Les yeux de Cécile, tournés vers le ciel, rayonnaient d’une extase divine, si bien que le professeur de philosophie tomba à genoux malgré lui en s’écriant, les mains jointes : Sancta Cæcilia, ora pro nobis6. Beaucoup de spectateurs suivirent son exemple avec un véritable enthousiasme, et quand le rideau se referma avec un sourd frôlement, tous restèrent, jusqu’aux jeunes demoiselles, plongés dans une dévotion silencieuse, jusqu’à ce qu’un transport universel et bruyant d’admiration vint soulager les cœurs oppressés.

Le poète et le musicien s’agitaient et grimaçaient comme des fous, et s’embrassaient tous deux en versant d’abondantes larmes. — On avait prié Cécile de garder pour tout le reste de la soirée son costume fantastique ; mais avec un sens exquis, elle s’y était refusée ; et quand elle reparut enfin dans le salon avec sa mise ordinaire et gracieuse, tout le monde se pressa autour d’elle en la comblant des plue vifs éloges, tandis qu’elle, dans sa candeur naïve, ne pouvant concevoir pourquoi on la louait si fort, attribuait l’effet saisissant de cette scène aux habiles dispositions du poète et du musicien. Madame seule