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Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/819

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se repose dans une douleur moins vive, dont la nature profite pour rétablir l’équilibre. C’est dans cette disposition d’esprit mélancolique que Traugott, quelques jours après, était assis au sommet du Karlsberg, d’où il contemplait les vagues de la mer et les nuages gris amoncelés encore sur le promontoire d’Hela. Mais il ne cherchait plus cette fois à y lire le pronostic de son avenir. Tout avait disparu, ses espérances et ses pressentiments. « Ah ! dit-il, ce n’était qu’une amère déception que cette prétendue vocation d’artiste. Le portrait de Felicitas fut l’appât trompeur qui m’entraina à prendre pour des réalités les rêves d’une imagination malade. C’en est fait, je me rends ; reprenons notre chaîne, le sort en est jeté ! » —

Traugott reprit ses occupations commerciales, et le jour de son mariage avec Christine fut de nouveau précisé. — La veille de ce jour même, Traugott était dans la Cour d’Artus, et regardait, plein d’une sombre tristesse, les deux mystérieuses figures du vieux bourguemestre et de son page, lorsque le courtier auquel il avait vu Berklinger proposer l’acquisition de ses valeurs, s’offrit tout-à-coup à ses yeux.

Sans s’en rendre compte, et presque involontairement, il alla à lui, et lui demanda s’il connaissait par hasard le singulier vieillard à la barbe noire et touffue qui venait habituellement quelque temps auparavant à la Bourse. — « Comment ne connaitrai-je pas, répondit celui-ci, le vieux peintre fou Gottfried Berklinger ?