Page:Hoffmann - Œuvres complètes, tome III.djvu/820

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» Et savez-vous, poursuivit Traugott, ce qu’il est devenu, quel est le lieu de son séjour ?

» Sans contredit, répliqua le courtier, il est depuis quelque temps à Sorrente avec sa fille. — Avec sa fille Felicitas ! s’écria Traugott d’une voix si retentissante, que tout le monde se retourna vers lui.

» Oui vraiment ! reprit son interlocuteur, c’était le joli jeune homme qui accompagnait partout le vieillard. La moitié de Dantzig le connaissait pour une jeune fille, quoique le vieux fou s’imaginât en faire un mystère à tout le monde. On lui avait prédit que la première liaison de cœur formée par sa fille serait pour lui le signal d’une mort terrible : voilà pourquoi il cherchait à déguiser son sexe, et la produisait sur la place comme un garçon. »

Traugott. resta stupéfait ; puis il se mit à courir à travers les rues, il franchit la barrière, et s’enfonça dans les bois en s’écriant dans son délire : « Ô malheureux que je suis ! c’était elle, elle-même ! Je me suis assis cent fois à ses cotés ; j’ai respiré son haleine, j’ai pressé ses mains délicates, j’ai vu son œil ravissant fixé sur moi, j’ai entendu sa voix si douce… et je l’ai à jamais perdue !… Non cela ne sera pas : je veux courir à sa recherche sous le beau ciel d’Italie, dans le pays des arts. — Je reconnais le doigt de la fatalité !… Partons, partons : À Sorrente ! » —

Il s’empressa de retourner au logis, où il tomba à la rencontre de messire Elias, qu’il saisit par la manche, et entraîna dans sa chambre. — « Je n’épouserai jamais Christine, lui cria-t-il, je trouve qu’elle