Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/245

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

une fois, comment je me trouvais de mon séjour au château. Je répondis que, durant les premiers jours, ses environs déserts et sauvages, et même l’antiquité du manoir m’avaient causé une impression étrange ; mais que j’avais éprouvé déjà de bien douces compensations, et que je désirais seulement me voir dispensé de prendre part à ces chasses fougueuses auxquelles je n’étais pas accoutumé.

La baronne me dit en souriant : « Je conçois aisément que ce tumulte sauvage au milieu de nos forêts de sapins ne soit pas fait pour vous plaire. Vous êtes musicien et, si je sais deviner, également poète, n’est-ce pas ? J’aime ces deux arts avec passion !… — Moi-même je pince un peu de la harpe, mais c’est un plaisir dont il faut que je me prive à R....sitten : car mon mari ne veut pas que j’apporte ici un pareil instrument, dont les sons caressants s’allieraient mal aux halloh farouches et au bruit retentissant des cors qui sont ici ma seule récréation. »

J’assurai que je ferais mon possible pour lui en procurer une autre ; car il devait indubitablement, selon moi, se trouver dans le château un instrument quelconque, ne fût-ce qu’un vieux clavecin. Là-dessus, mademoiselle Adelheid (c’était le nom de la dame de compagnie) éclata de rire, et me demanda si j’ignorais que de mémoire d’homme on n’avait entendu résonner dans ce château d’autres instruments que les trompettes aiguës mariant leurs fanfares aux refrains lamentables des cors de chasse, et parfois aussi les violons criards, les basses discordantes