Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/278

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plus inquiet qu’il ne voulait le paraître. Je fis un mouvement pour me retirer. Alors le baron saisit tout à coup mon bras et me dit avec des yeux étincelants : « J’ai à vous parler, jeune homme ! » — Ne devais-je pas voir en lui, dans ce moment, le mari gravement offensé, et ne devais-je pas appréhender une explication qui pouvait tourner peut-être à ma confusion ? J’étais sans armes ; mais je me souvins aussitôt de ce couteau de chasse remarquable dont mon grand-oncle m’avait fait présent, et que je portais dans ma poche. Alors je suivis le baron qui m’entraînait avec lui, bien décidé à n’épargner la vie de personne, si je me voyais exposé à la moindre humiliation.

Nous arrivâmes dans la chambre du baron, qui ferma la porte derrière lui ; puis il se mit à arpenter le plancher, les bras croisés, et s’arrêta enfin devant moi en répétant : « Jeune homme ! j’ai à vous parler. » Je me sentais animé d’un courage intrépide. et je répondis du ton le plus absolu : « J’espère que ce sera d’une manière qui ne m’obligera à demander aucune réparation ! »

Le baron me regarda tout étonné comme s’il ne m’avait pas compris. Ensuite il baissa les yeux, croisa les bras derrière le dos, et recommença à marcher de long en large d’un air sombre. Je le vis prendre un fusil et y enfoncer la baguette comme pour s’assurer qu’il était chargé. Le sang bouillonnait dans mes veines, je portai la main à mon couteau, et je m’approchai tout près du baron pour le mettre dans l’impossibilité de m’ajuster. — « Une