Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/313

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quatre mille frédérics d’or en espèces, et qu’il me permettra de venir au moins séjourner quelquefois passagèrement dans ce beau domaine, auprès d’un frère bien-aimé !

— Jamais ! jamais, je ne consentirai qu’Hubert passe seulement une minute dans ce séjour, lorsque ma femme y sera arrivée ! » Ainsi s’écria le baron, lorsque V. lui rapporta les dernières propositions de son frère. « Allez, mon cher ami, ajouta-t-il, dites à cet enragé qu’il aura, non pas à titre d’avance, mais en pur don, deux mille frédèrics d’or. Allez, je vous prie. »

V. savait donc maintenant pertinemment que le baron était déjà marié à l’insu de son père, et que ce mariage était à coup sûr l’origine de la dissension existant entre les deux frères. Hubert écouta tranquillement et fièrement le justicier, et quand il eut fini de parler, il lui répondit d’une voix sourde et lente : « Je réfléchirai, mais en attendant je reste encore quelques jours ici. »

V. s’efforça de lui prouver que le baron faisait en effet tout ce qui dépendait de lui pour le dédommager, en renonçant à la part franche de la succession, et que par conséquent ses plaintes n’étaient pas justement fondées ; tout en convenant avec lui qu’un genre d’institution, qui favorisait si excessivement l’ainé de la famille au détriment des autres enfants, avait quelque chose de haïssable. Mais Hubert déboutonnant avec vivacité son gilet du haut en bas, comme pour donner de l’air à sa poitrine oppressée, froissant d’une main son jabot en désordre, et l’