Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/342

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au remboursement d’une somme égale sa part des propriétés situées en Courlande.

V., depuis le jour où Daniel lui était apparu comme somnambule, avait choisi pour logement l’ancienne chambre à coucher du vieux Roderich, afin de pouvoir mieux épier l’intendant, de qui il attendait quelque révélation involontaire. Il arriva ainsi que le baron et V. se trouvaient ensemble dans la grand’salle voisine de cette pièce, occupés à conférer des affaires du majorat. Tous deux étaient assis près d’une grande table devant un feu pétillant ; V., la plume à la main, était en train de chiffrer et d’établir le montant des richesses du nouveau seigneur, tandis que celui-ci, accoudé sur la table, jetait un coup d’œil satisfait sur les registres et sur des pièces de comptabilité d’une haute importance.

Ni l’un ni l’autre n’entendait le mugissement sourd de la mer et le cri sauvage des mouettes qui, dans leur vol incertain, battaient les carreaux de leurs ailes ; ni l’un ni l’autre n’avait fait attention à l’ouragan qui s’était élevé à minuit, et se déchainait impétueusement dans tout le château de manière à produire dans les droits et longs corridors des sifflements aigus et lamentables.

À la fin, un coup de vent furieux ayant ébranlé pour ainsi dire le bâtiment tout entier, en même temps que la lueur blafarde de la lune pénétrait dans la salle obscure, V. s’écria : « Un temps affreux ! — Oui, épouvantable ! » répondit nonchalamment le baron tout absorbé dans la contemplation de son