Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/349

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d’animosité allumés dans l’âme d’Hubert par un aveugle dépit. Ce fut à la chasse, dans la forêt de pins, au milieu de l’orage et des vents déchainés, qu’ils tombèrent d’accord sur la perdition de Wolfgang. « Il faut s’en défaire, murmurait Hubert en détournant la tête, et faisant mine de décharger son arquebuse. — Oui, il le faut ! répondit Daniel sourdement ; mais non pas ainsi, non pas ainsi ! » Alors il avança hardiment qu’il répondait de la mort du baron, et que pas un coq n’en divulguerait le secret.

Cependant Hubert était résolu à partir après avoir reçu l’argent ; car la pensée d’un pareil crime lui était à charge, et il voulait ne pas rester exposé à une affreuse tentation. La nuit fixée pour son départ, Daniel alla brider son cheval et le fit sortir dans la cour ; mais, lorsque le baron se disposait à y monter, il lui dit d’une voix accentuée : « Baron Hubert, je ne pense pas que tu veuilles quitter le majorat qui vient de t’écheoir à l’instant même : car le ci-devant seigneur est mort à cette heure écrasé au fond des ruines de la tour ! »

Daniel avait observé que Wolfgang, tourmenté par la soif de l’or, se levait souvent pendant la nuit, et allait sur le seuil de l’ancien passage qui conduisait à la tour, contempler avec des regards avides ce gouffre qui, sur l’assurance de Daniel, devait contenir un amas de richesses. Guidé par cette découverte, Daniel, durant la nuit fatale, s’était posté tout près de la porte de la tour. Le baron l’aperçut et s’écria, en se retournant vers le farouche vieillard, dans les yeux duquel étincelait un désir sanglant de vengeance : «