Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/75

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comme porté sur l’aile du vent, je me relève, je cours après lui, — tout en courant je sonne de ma trompe : les sifflets de mes gens me répondent au loin. L’action s’anime, de tous côtés résonne le trot des chevaux, le cliquetis des armes. — Par ici ! par ici ! — Desgrais ! Desgrais ! m’écriai-je à en faire retentir le quartier. — Éclairé par la lune, je vois toujours devant moi l’individu qui tourne à droite, puis à gauche dans le but de me dérouter ; nous arrivons à la rue Saint-Nicaise : là, ses forces semblent s’épuiser, les miennes redoublent, il a tout au plus encore quinze pas d’avance…

— Vous l’atteignez, le saisissez, les gardes arrivent !… » s’écrie La Reynie, le regard étincelant, et en empoignant Desgrais par le bras, comme s’il eût été l’assassin lui-même. — « Quinze pas...., poursuivit Desgrais d’une voix creuse et la respiration oppressée, à quinze pas !… sous mes yeux, le coquin fait un saut de côté dans l’ombre, — et disparaît à travers la muraille.

— Disparaît !… à travers la muraille ? — Êtes-vous fou ? » s’écrie La Reynie en reculant de deux pas et en frappant des mains.

« Fou ! reprend Desgrais en se frottant le front, comme quelqu’un tourmenté d’une pensée funeste, oui, traitez-moi de fou, monseigneur, de sot visionnaire, mais ce n’est pas autrement que je vous le raconte. — Je demeure stupéfait devant la muraille, pendant que plusieurs gardes arrivent hors d’haleine, et avec eux le marquis de La Fare, l’épée à la main. Je fais allumer les torches, nous sondons la