Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 1.djvu/174

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partis du principe que cette ame étoit un pur esprit, une substance immatérielle, d’une essence très différente des corps ou de tout ce que nous voyons : cela posé, ils n’ont jamais pu concevoir comment des objets matériels, des organes grossiers & corporels pouvoient agir sur une substance qui ne leur étoit nullement analogue, & la modifier en lui portant des idées ; dans l’impossibilité d’expliquer ce phénomène, & voyant pourtant que l’ame avoit des idées, ils en conclurent que cette ame devoit les tirer d’elle-même & non des êtres dont, suivant leur hypothèse, ils ne pouvoient concevoir l’action sur elle ; ils s’imaginèrent donc que toutes les modifications de cette ame étoient dues à sa propre énergie, lui étoient imprimées dès le moment de sa formation par l’auteur de la nature qui étoit immatériel comme elle, & ne dépendoit aucunement des êtres que nous connoissons ou qui agissent sur nous par la voie grossière des sens.

Il est pourtant quelques phénomènes qui, envisagés superficiellement, sembleroient appuyer l’opinion de ces philosophes, & annoncer dans l’ame humaine la faculté de produire des idées en elle-même, sans aucuns secours extérieurs ; ce sont les songes, dans lesquels notre organe intérieur, privé d’objets qui le remuent visiblement, ne laisse pas d’avoir des idées, d’être mis en action, & d’être modifié d’une façon assez sensible pour influer même sur le corps. Mais pour peu qu’on réfléchisse, on trouvera la solution de cette difficulté ; nous verrons que durant le sommeil même notre cerveau est meublé d’une foule d’idées que la veille lui a fournies ; ces idées lui ont été portées par les objets extérieurs & corporels, qui