Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 1.djvu/39

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chercher hors de la nature une force diſtinguée d’elle-même qui la mît en action, & ſans laquelle ils ont cru qu’elle ne pouvoit ſe mouvoir. Si par la nature nous entendons un amas de matières mortes, dépourvues de toutes propriétés, purement paſſives, nous ſerons, ſans doute, forcés de chercher hors de cette nature le principe de ſes mouvemens ; mais ſi par la nature nous entendons ce qu’elle eſt réellement, un tout dont les parties diverſes ont des propriétés diverſes, qui dès lors agiſſent ſuivant ces mêmes propriétés, qui ſont dans une action & une réaction perpétuelles les unes ſur les autres, qui peſent, qui gravitent vers un centre commun, tandis que d’autres s’éloignent & vont à la circonférence, qui s’attirent & ſe repoussent, qui s’uniſſent & ſe ſéparent, & qui par leurs colliſions & leurs rapprochemens continuels produiſent & décompenſent tous les corps que nous voyons, alors rien ne nous obligera de recourir à des forces ſurnaturelles pour nous rendre compte de la formation des choſes, & des phénomenes que nous voyons. [1]

Ceux qui admettent une cauſe extérieure à la matiere sont obligés de ſupposer que cette cauſe a produit tout le mouvement dans cette matiere en lui donnant l’exiſtence ; cette ſuppoſition eſt fondée ſur une autre, ſçavoir, que la matiere a pu commencer d’exiſter, hypothèſe qui juſqu’ici n’a jamais été démontrée par des preuves valables. L’éduction du Néant ou la Création n’eſt qu’un mot qui ne peut nous donner une idée de la for-

  1. Pluſieurs Théologiens ont reconnu que la nature étoit un tout actif. Natura eſt vis activa ſeu motrix ; hine natura etiam dicitur vis totius mundi, ſeu vis univerſa in mundo. V. Bilfinger de deo, anima et mundo. pag. 278.