Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 1.djvu/54

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voir de particules enflammées qui éclaire le firmament ; depuis l’huître engourdie juſqu’à l’homme actif & penſant, nous voyons une progreſſion non interrompue, une chaîne perpétuelle de combinaiſons & de mouvemens, dont il réſulte des êtres, qui ne different entre eux que par la variété de leurs matieres élémentaires, des combinaiſons & des proportions de ces mêmes élémens, d’où naiſſent des façons d’exiſter & d’agir infiniment diverſifiées. Dans la génération, dans la nutrition, dans la conſervation, nous ne verrons jamais que des matieres diverſement combinées, qui chacune ont des mouvemens qui leur ſont propres, réglés par des loix fixes & déterminées, & qui leur font ſubir des changemens néceſſaires. Nous ne trouverons dans la formation, la croiſſance & la vie inſtantanée des animaux, des végétaux & des minéraux que des matieres qui ſe combinent, qui s’aggregent, qui s’accumulent, qui s’étendent & qui forment peu à peu des êtres ſentans, vivans, végétants, ou dépourvus de ces facultés, & qui, après avoir exiſté quelque tems ſous une forme particulière, sont forcés de contribuer par leur ruine à la production d’une autre. [1]

  1. Deſtructio unius, generatio alterius. A parler exactement, rien ne naît & ne meurt dans la nature ; vérité qui a été ſentie par pluſieurs anciens Philoſophes. Empédocle dit, il n’y a ni naiſſance ni mort pour chacun des mortels ; mais ſeulement une combinaiſon, & une ſéparation de ce qui étoit combiné, & c’eſt ce que parmi les hommes l’on appelle naiſſance & mort. Le même Philoſophe dit encore, ceux là ſont des enfans, ou des gens dont les vues ſont bornées, qui s’imaginent qu’il naiſſe quelque choſe qui n’exiſtoit pas auparavant, ou que quelque choſe puiſſe mourir ou périr totalement. Voyez Plutarch. contr. colot. Platon avoue que ſuivant une ancienne tradition, les vivants naiſſoient des morts, de même que les morts venoient des vivants & que c’eſt là le cercle conſtant de la Nature. Il ajoute ailleurs de lui même, qui ſcait si vivre n’eſt point mourir, & ſi mourir n’eſt point vivre ? C’étoit encore la doctrine de Pythagore, à qui Ovide fait dire

    .... naſcique vocatur.
    incipere eſſe aliud quam quod fuit ante ; morique
    deſinere illud idem.

    V. Metamorph. Lib xv v. 254.