Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 1.djvu/89

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il occupe une place ; que depuis le moment où il naît jusqu’à celui où il meurt il est continuellement modifié par des causes qui, malgré lui, influent sur sa machine, modifient son être, & disposent de sa conduite. La moindre réflexion ne suffit-elle pas pour lui prouver que les solides & les fluides dont son corps est composé, & que son méchanisme caché qu’il croit indépendant des causes extérieures, sont perpétuellement sous l’influence de ces causes, & seroient sans elles dans une incapacité totale d’agir ? Ne voit-il pas que son tempérament ne dépend aucunement de lui-même, que ses passions sont des suites nécessaires de ce tempérament, que ses volontés & ses actions sont déterminées par ces mêmes passions & par des opinions qu’il ne s’est pas données ? Son sang plus ou moins abondant ou échauffé, ses nerfs & ses fibres plus ou moins tendus ou relâchés, ces dispositions durables ou passagères, ne décident-elles pas à chaque instant de ses idées, de ses pensées, de ses desirs & de ses craintes, de ses mouvemens soit visibles soit cachés, & l’état où il se trouve ne depend-il pas nécessairement de l’air diversement modifié, des alimens qui le nourrissent, des combinaisons secretes qui se font en lui-même, & qui conservent l’ordre ou portent le désordre dans sa machine ? En un mot tout auroit dû convaincre l’homme qu’il est dans chaque instant de sa durée un instrument passif entre les mains de la nécessité.

Dans un monde où tout est lié, où toutes les causes sont enchaînées les unes aux autres, il ne peut y avoir d’énergie ou de force indépendante & isolée. C’est donc la nature toujours agissante qui marque à l’homme chacun des points de la li-