Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 1.djvu/91

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mouvemens deviennent nécessairement très compliqués, leur lenteur aussi bien que leur rapidité les dérobent souvent aux observations de celui même dans lequel ils se passent.

Ne soyons donc pas surpris si l’homme rencontra tant d’obstacles lorsqu’il voulut se rendre compte de son être & de sa façon d’agir ; & s’il imagina de si étranges hypotheses pour expliquer les jeux cachés de sa machine, qu’il vit se mouvoir d’une façon qui lui parut si différente de celle des autres êtres de la nature. Il vit bien que son corps & ses différentes parties agissoient, mais souvent il ne put voir ce qui les portoit à l’action ; il crut donc renfermer au-dedans de lui-même un principe moteur, distingué de sa machine, qui donnoit secrétement l’impulsion aux ressorts de cette machine, se mouvoit par sa propre énergie, & agissoit suivant des loix totalement différentes de celles qui reglent les mouvemens de tous les autres êtres. Il avoit la conscience de certains mouvemens internes qui se faisoient sentir à lui, mais comment concevoir que ces mouvemens invisibles pussent souvent produire des effets si frappans ? Comment comprendre qu’une idée fugitive, qu’un acte imperceptible de la pensée pussent souvent porter le trouble & le désordre dans tout son être ? En un mot il crut appercevoir en lui-même une substance distinguée de lui, douée d’une force secrete dans laquelle il supposa des caractères entièrement différens de ceux des causes visibles qui agissoient sur ses organes, ou de ceux de ces organes mêmes. Il ne fit point attention que la cause primitive qui fait qu’une pier-