prudentes & ſenſées. L’auteur de tout ce qui exiſte doit être également l’auteur de ce que nous appellons déraiſonnable & de ce que nous jugeons très ſage. D’un autre côté, pour juger de l’intelligence & de la ſageſſe d’un être, il faudroit au moins entrevoir le but qu’il ſe propoſe. Quel eſt le but de Dieu ? C’eſt, nous dit-on, ſa propre gloire ; mais ce Dieu parvient-il à ce but & les pécheurs ne refuſent-ils pas de le glorifier ? D’ailleurs ſuppoſer que Dieu eſt ſenſible à la gloire, n’eſt-ce pas lui ſuppoſer nos folies & nos foibleſſes ? N’eſt-ce pas le dire orgueilleux ? Si l’on nous dit que le but de la ſageſſe divine eſt de rendre les hommes heureux, je demanderai toujours pourquoi ces hommes, en dépit de ſes vues, ſe rendent ſi ſouvent malheureux ? Si l’on me dit que les vues de Dieu ſont impénétrables pour nous ; je répondrai 1o que dans ce cas c’eſt au hazard que l’on dit que la Divinité ſe propoſe le bonheur de ſes créatures, objet qui, dans le fait, n’eſt jamais rempli. Je répondrai 2o qu’ignorant ſon vrai but, il nous eſt impoſſible de juger de ſa ſageſſe, & qu’il y a de la démence à vouloir en raiſonner.
XII. La cauſe ſuprême doit néceſſairement poſſéder une bonté, une juſtice, une véracité infinies & toutes les autres perfections morales qui conviennent au gouverneur & au ſouverain juge du monde.
L’idée de la perfection eſt une idée abſtraite, métaphyſique, négative qui n’a nul Archétype ou modele hors de nous. Un être parfait ſeroit un être ſemblable à nous dont par la penſée nous ôtons toutes les qualités que nous trouvons nuiſibles à nous-mêmes, & que pour cette raiſon nous