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Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/127

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On nous dira, ſans doute, que Dieu s’eſt fait connoître par la révélation. Mais cette révélation ne ſuppoſe-t-elle pas l’exiſtence du Dieu ſur laquelle nous diſputons ? Cette révélation elle-même n’anéantit-elle pas les perfections morales qu’on lui attribue ? Toute révélation ne ſuppoſe-t-elle pas dans les hommes une ignorance, une imperfection, une perverſité qu’un Dieu bon, ſage, tout puiſſant & prévoyant auroit dû prévenir ? Toute révélation particuliere ne ſuppoſe-t-elle pas dans ce Dieu une préférence, une prédilection, une injuſte partialité pour quelques-unes de ſes créatures ; diſpoſitions qui contrediſent viſiblement & ſa bonté & ſa juſtice infinies ? Cette révélation n’annonce-t-elle pas en lui de l’averſion, de la haîne, ou du moins de l’indifférence, pour le plus grand nombre des habitans de la terre ou même un deſſein formé de les aveugler pour les perdre ? En un mot dans toutes les révélations connues, la Divinité, au lieu de nous être repréſentée comme ſage, comme équitable, comme remplie de tendreſſe pour l’homme, ne nous eſt-elle pas continuellement dépeinte comme fantaſque, comme inique, comme cruelle, comme voulant ſéduire ſes enfans, comme leur tendant, ou leur faiſant tendre des pieges, comme les punisſant enſuite pour y être tombés ? En vérité le Dieu du Docteur Clarcke & des chrétiens ne peut être regardé comme un être parfait, à moins que dans la Théologie l’on n’appelle perfections ce que la raiſon ou le bon ſens appellent des imperfections frappantes ou des diſpoſitions odieuſes. Diſons plus ; il n’eſt point dans la race humaine d’individus auſſi méchant auſſi vindicatif, auſſi injuſte, auſſi cruel que le tyran à qui les chrétiens prodiguent leurs hommages ſerviles & à qui leurs