Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/149

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mouvoir, à conserver, à produire que devient la force motrice de l’univers ? Si Dieu est cette force motrice que deviendra-t-il sans un monde dans lequel il puisse exercer son action [1] ?

On voit donc que Descartes, loin d’établir solidement l’existence d’un dieu, la détruit totalement. La même chose arrivera nécessairement à tous ceux qui en raisonneront ; ils finiront toujours par se contredire, & se démentir eux-mêmes. Nous trouvons les mêmes inconséquences & contradictions dans les principes du célèbre père Malebranche, qui considérés avec l’attention la plus légère, semblent conduire directement au spinosisme ; en effet quoi de plus conforme au langage de Spinosa que de dire que l’univers n’est qu’une émanation de Dieu ; que nous voyons tout en Dieu ; que tout ce que nous voyons est Dieu seul ; que Dieu seul fait tout ce qui se fait ; qu’il est lui-même toute l’action & toute l’opération qui est dans toute la nature ; en un mot que Dieu est tout l’être & le seul être.

N’est-ce pas dire formellement que la nature est Dieu ? D’ailleurs en même tems que Malebranche nous assure que nous voyons tout en Dieu, il prétend qu’il n’est pas encore bien démontré qu’il y ait une matière & des corps, & que la foi seule nous enseigne ces grands mystères, dont sans elle nous n’aurions aucune connoissance. Sur quoi l’on peut avec raison lui demander comment l’on peut démontrer l’existence du dieu qui a créé la matière, si l’existence de cette matière est encore un problême ?

Malebranche reconnoît lui-même que l'on

  1. Voyez l’impie convaincu, ou dissertation contre Spinosa, pages 45 et suiv., édit. d’Amst. 1685.