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Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/171

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mais pour que ces idées puissent être peintes, il faut préalablement qu’elles ayent été reçues, combinées, nourries, développées & liées dans la tête d’un poëte, où les circonstances les font fructifier & meurir, en raison de la fécondité, de la chaleur, & de l’énergie du sol où ces germes intellectuels auront été jettés. Les idées se combinent, s’étendent, se lient, s’associent, font un ensemble comme tous les corps de la nature : cet ensemble nous plaît quand il fait naître dans notre esprit des idées agréables, quand il nous offre des tableaux qui nous remuent vivement. C’est ainsi que le poëme d’Homère, enfanté dans sa tête, a le pouvoir de plaire à des têtes analogues & capables d’en sentir les beautés.

On voit donc que rien ne se fait au hazard. Tous les ouvrages de la nature se font d’après des loix certaines, uniformes, invariables ; soit que notre esprit puisse avec facilité suivre la chaîne des causes successives qu’elle met en action, soit que dans ses ouvrages trop compliqués nous nous trouvions dans l’impossibilité de distinguer les différens ressorts qu’elle fait agir. Il n’en coûte pas plus à la nature pour produire un grand poëte, capable de faire un ouvrage admirable, que pour produire un métal brillant ou une pierre qui gravite sur la terre. La façon dont elle s’y prend pour produire ces différens êtres nous est également inconnue, quand nous n’y avons point médité. L’homme naît par le concours nécessaire de quelques élémens ; il s’accroît & se fortifie de la même manière qu’une plante ou qu’une pierre, qui se sont, ainsi que lui, accrues & augmentées par des substances qui viennent s’y joindre : cet homme sent, pense, agit, reçoit des idées, c’est-