des maux sans nombre seroient les suites nécessaires. N’adorons point, ne flattons point à la manière des hommes, une nature sourde qui agit nécessairement & dont rien ne peut déranger le cours. N’implorons point un tout qui ne peut se maintenir que par la discorde des élémens, d’où naît l’harmonie universelle & la stabilité de l’ensemble. Songeons que nous sommes des parties sensibles d’un tout dépourvu de sentiment, dans lequel toutes les formes & les combinaisons se détruisent après être nées & avoir subsisté plus ou moins longtems. Regardons la nature comme un attelier immense qui renferme tout ce qu’il faut pour agir & pour produire tous les ouvrages que nous voyons. Reconnoissons son pouvoir inhérent à son essence ; n’attribuons point ses œuvres à une cause imaginaire qui n’existe que dans notre cerveau. Bannissons plutôt à jamais de notre esprit un phantôme propre à le troubler, & à nous empêcher de prendre les voies simples, naturelles & sûres qui peuvent nous conduire au bonheur. Rétablissons donc cette nature si longtems méconnue dans ses droits légitimes ; écoutons sa voix, dont la raison est l’interprète fidèle ; faisons taire l’enthousiasme & l’imposture qui, pour notre malheur, nous ont écartés du seul culte convenable à des êtres intelligens.
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