Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/241

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Nulle erreur ne peut être avantageuse au genre-humain ; elle n’est jamais fondée que sur son ignorance ou l’aveuglement de son esprit. Plus les hommes attacheront d’importance à leurs préjugés, plus leurs erreurs auront pour eux des conséquences fâcheuses. Ainsi Bacon a eu raison de dire que la plus mauvaise des choses, c’est l’erreur déïfiée. En effet, les inconvéniens qui résultent de nos erreurs religieuses ont été & seront toujours les plus terribles & les plus étendus. Plus nous respectons ces erreurs, plus elles mettent nos passions en jeu, plus elles troublent notre esprit, plus elles nous rendent déraisonnables, plus elles influent sur toute la conduite de la vie. Il y a peu d’apparence que celui qui renonce à sa raison dans la chose qu’il regarde comme la plus essentielle à son bonheur, l’écoute en toute autre chose.

Pour peu que nous y réfléchissions nous trouverons la preuve la plus convaincante de cette triste vérité ; nous verrons dans les notions funestes que les hommes ont prises de la divinité la vraie source des préjugés & des maux de toute espèce dont ils sont les victimes. Cependant, comme on l’a dit ailleurs, l’utilité doit être la seule règle & l’unique mesure des jugemens que l’on porte sur les opinions, les institutions, les systêmes & les actions des êtres intelligens ; c’est d’après le bonheur que ces choses nous procurent que nous devons y attacher notre estime ; dès qu’elles nous sont inutiles, nous devons les mépriser ; dès qu’elles nous sont pernicieuses, nous devons les rejetter ; & la raison nous prescrit de les détester à proportion de la grandeur des maux qu’elles nous causent.