Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/253

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leurs honteux déréglemens, joignirent à tous leurs forfaits celui de tyranniser la pensée & de massacrer des citoyens pour des opinions. La superstition dans les princes s’allie avec les crimes les plus affreux ; presque tous ont de la religion, très peu connoissent la vraie morale ou pratiquent des vertus utiles. Les notions religieuses ne servent qu’à les rendre plus aveugles & plus méchans, ils se croient assûrés de la faveur du ciel ; ils pensent que leurs dieux sont appaisés, pour peu qu’ils montrent de l’attachement aux pratiques futiles & aux devoirs ridicules que la superstition leur impose. Néron, le cruel Néron, les mains encore teintes du sang de sa propre mère, voulut se faire initier aux mystères d’éleusis. L’odieux Constantin trouva dans les prêtres chrétiens des complices disposés à expier ses forfaits. Cet infame Philippe, que son ambition cruelle fit nommer le démon du midy, tandis qu’il assassinoit & sa femme & son fils, faisoit pieusement égorger le batave pour des opinions religieuses. C’est ainsi que l’aveuglement superstitieux persuade aux souverains qu’ils peuvent expier des forfaits par des forfaits plus grands encore !

Concluons donc de la conduite de tant de princes si religieux & si peu vertueux, que les notions de la divinité, loin de leur être utiles, ne servent qu’à les corrompre, à les rendre plus méchans que la nature ne les a faits. Concluons que jamais la crainte d’un dieu vengeur ne peut en imposer à un tyran déifié, assez puissant ou assez insensible pour ne point craindre les reproches ou la haine des hommes ; assez dur pour ne point s’attendrir sur les maux de l’espèce humaine dont il se croit distingué : ni le ciel ni la terre