Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/263

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ter le crime au nom du ciel, le despote religieux qui se feroit un scrupule d’omettre les prétendus devoirs que la superstition lui impose, ne retourne-t-il pas à ses vices, à ses injustices, à ses crimes politiques, à ses forfaits contre la société ? Le ministre ne retourne-t-il pas à ses vexations, le courtisan à ses intrigues, la femme galante à ses prostitutions, le publicain à ses rapines, le marchand à ses fraudes & à ses supercheries ?

Prétendra-t’on que ces assassins, ces voleurs, ces malheureux que l’injustice ou la négligence des gouvernemens multiplient, & à qui des loix souvent cruelles arrachent impitoyablement la vie ; dira-t-on, dis-je, que ces malfaiteurs qui chaque jour remplissent nos gibets & nos échaffauts, sont des incrédules ou des athées ? Non, sans doute ; ces misérables, ces rebuts de la société croyoient en Dieu ; on leur en a répété le nom dans leur enfance ; on leur a parlé des chatimens qu’il destinoit aux crimes ; ils se sont de bonne heure habitués à trembler à la vue de ses jugemens ; cependant ils ont outragé la société ; leurs passions plus fortes que leurs craintes n’ayant pu être retenues par les motifs visibles, ne l’ont, à plus forte raison, point été par des motifs invisibles : un dieu caché & ses châtimens lointains ne pourront jamais empêcher des excès que des supplices présens & assûrés sont incapables de prévenir.

En un mot ne voyons-nous pas à chaque instant des hommes persuadés que leur Dieu les voit, les écoute, les environne, & n’être point arrêtés pour cela lorsqu’ils ont le desir de contenter leurs passions & de commettre les actions les plus deshonnêtes ? Le même homme qui craindroit les re-