Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/302

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Ne seroit-ce donc que pour des prêtres, des inspirés, des métaphysiciens que seroit réservée la conviction de l’existence d’un dieu, que l’on dit néanmoins si nécessaire à tout le genre-humain ? Mais trouvons-nous de l’harmonie entre les opinions théologiques des différens inspirés, ou des penseurs répandus sur la terre ? Ceux même qui font profession d’adorer le même dieu sont-ils d’accord sur son compte ? Sont-ils contens des preuves que leurs collégues apportent de son existence ? Souscrivent-ils unanimement aux idées qu’ils présentent sur sa nature, sur sa conduite, sur la façon d’entendre ses prétendus oracles ? Est-il une contrée sur la terre, où la science de Dieu se soit réellement perfectionnée ? A-t-elle pris quelque part la consistence & l’uniformité que nous voyons prendre aux connoissances humaines, aux arts les plus futiles, aux métiers les plus méprisés ? Les mots d’esprit, d’immatérialité, de création, de prédestination, de grace ; cette foule de distinctions subtiles dont la théologie s’est par-tout remplie dans quelques pays ; ces inventions si ingénieuses, imaginées par des penseurs qui se sont succédé depuis tant de siècles, n’ont fait, hélas ! Qu’embrouiller les choses ; & jamais sa science la plus nécessaire aux hommes

    De l’aveu même des théologiens, les hommes sont sans religion : ils n’ont que des superstitions. La superstition selon eux est un culte mal entendu et déraisonnable de la Divinité : on bien un culte rendu à une fausse Divinité. Mais quel est le peuple ou le clergé qui conviendra que sa divinité est fausse et son culte déraisonnable ? Comment décider qui a tort ou raison ? Il est évident qu’en cette matière tous les hommes ont également tort. En effet Buddeus dans son Traité de l’athéisme nous dit que, pour qu’une religion soit véritable, non seulement l’objet de son culte doit être vrai, il faut encore en avoir une juste idée. Celui donc qui adore Dieu sans le connaître, l’adore d’une façon perverse et corrompue, et est coupable de superstition. Cela posé, ne peut-on pas demander à tous les théologiens du monde s’ils peuvent se vanter d’avoir une idée juste, ou une connaissance réelle de la divinité ?