Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/326

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

stineront point à persister dans l’erreur. Inspirons du courage à ceux qui n’ont point la force de briser avec leurs illusions. Rassurons l’homme de bien, que ses craintes allarment bien plus que le pervers qui, en dépit de ses opinions, suit toujours ses passions ; consolons le malheureux qui gémit sous le poids des préjugés qu’il n’a point examinés ; dissipons les incertitudes de celui qui doute & qui, cherchant de bonne foi la vérité, ne trouve souvent dans la philosophie même que des opinions flottantes peu propres à fixer son esprit. Bannissons pour l’homme de génie la chimere qui lui fait perdre son tems : arrachons son noir phantôme à l’homme intimidé, qui dupe de ses vaines frayeurs, devient inutile à la société : ôtons à l’atrabilaire un dieu qui l’afflige, qui l’aigrit, qui ne fait qu’allumer sa bile : arrachons au fanatique le dieu qui lui met des poignards à la main. Arrachons aux imposteurs & aux tyrans un dieu qui leur sert à épouvanter, asservir & dépouiller le genre-humain. En ôtant aux honnêtes gens leurs redoutables idées, ne rassurons point les méchans, les ennemis de la société ; privons les de ces ressources sur lesquelles ils comptent pour expier leurs forfaits ; à des terreurs incertaines & éloignées qui ne pouvoient arrêter leurs excès, substituons des terreurs réelles & présentes ; qu’ils rougissent en se voyant tels qu’ils sont ; qu’ils frémissent en trouvant leurs complots découverts ; qu’ils tombent dans la crainte de voir un jour les mortels qu’ils outragent revenus des erreurs dont ils se servent pour les enchaîner.

Si nous ne pouvons guérir les nations de leurs préjugés invétérés, tâchons au moins de les empêcher de retomber dans les excès dans lesquels la