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Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/346

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mes ont été forcés d’entrevoir que leurs adversaires pourroient en tirer des inductions contraires aux notions qu’ils ont intérêt de maintenir ; en conséquence ils se sont souvent très hautement élevés contre ceux-mêmes qui croyoient avoir trouvé les preuves les plus fortes de l’existence de leur dieu ; ils ne s’appercevoient pas, sans doute, qu’il est impossible de ne pas prêter le flanc en établissant des principes ou des systêmes visiblement fondés sur un être imaginaire, contradictoire, que chaque homme voit diversement[1].

En un mot, l’on a taxé d’athéisme & d’irréligion presque tous ceux qui ont pris le plus vivement en main la cause du dieu théologique ; ses partisans les plus zélés ont été regardés comme des tranfuges & des traîtres ; les théologiens les plus religieux n’ont pu se garantir de ce reproche ; ils se le sont mutuellement prodigué, & tous l’ont, sans doute, mérité si par athées l’on désigne des hommes qui n’ont de leur dieu aucune idée qui ne se détruise dès qu’on veut en raisonner.

  1. Que peut-on penser des sentimens d’un homme comme Pascal, article 8 de ses Pensées, où il montre au moins une incertitude très-complète sur l’existence de Dieu ? J’ai recherché, dît-il, si ce Dieu, dont tout le monde parle, n’aurait point laissé quelques marques de lui. Je regarde de toutes parts ; et ne vois partout qu’obscurité. La nature ne m’offre rien qui ne soit matière de doute et d’inquiétude. Si je n’y voyais rien qui marquât une divinité, je me déterminerais à ne rien croire. Si je voyais partout les marques d’un créateur, je reposerais en paix dans la foi. Mais voyant trop pour nier, et trop peu pour m’assurer, je suis dans un état à plaindre, et où j’ai souhaité cent fois que, si un DIEU soutient la nature, elle le marqua sans équivoque, et que si les marques qu’elle en donne sont trompeuses, elle les supprimât tout-àJait : qu’elle dit tout ou rien, afin que je visse quel parti je dois suivre. Voilà l’etat d’un bon esprit luttant contre les préjuges qui l’enchaînent.