Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/49

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ce qu’il jouit de certaines facultés qui dépendent de son organisation. Bientôt il étend ou exagère toutes ces qualités ; la vue des phénomènes de la nature, qu’il se sent incapable de produire ou d’imiter, le force à mettre de la différence entre son dieu & lui ; mais il ne sçait où s’arrêter ; il craindroit de se tromper s’il osoit fixer les bornes des qualités qu’il lui assigne ; le mot infini est le terme abstrait & vague dont il se sert pour les caractériser. Il dit que sa puissance est infinie, ce qui signifie qu’il ne conçoit pas où son pouvoir peut s’arrêter à la vue des grands effets dont il le fait l’auteur. Il dit que sa bonté, sa sagesse, sa science, sa clémence sont infinies ; ce qui veut dire qu’il ignore jusqu’où ses perfections peuvent aller dans un être dont la puissance surpasse autant la sienne. Il dit que ce dieu est éternel, c’est-à-dire infini pour la durée, parce qu’il ne comprend pas qu’il ait pu commencer ni qu’il puisse jamais cesser d’exister, ce qu’il estime un défaut dans les êtres transitoires qu’il voit se dissoudre & sujets à la mort. Il présume que la cause des effets dont il est témoin est nécessaire, immuable, permanente, & non sujette à changer comme toutes ses œuvres passagères qu’il connoit soumises à la dissolution, à la destruction, au changement de formes. Ce moteur prétendu étant toujours invisible pour l’homme, agissant d’une façon impénétrable & cachée, il croit que, semblable au principe caché qui anime son propre corps, un dieu est le mobile de l’univers, en conséquence il en fait l’ame, la vie, le principe du mouvement de la nature. Enfin quand à force de subtiliser il est parvenu à croire que le principe qui meut son corps est un esprit, une substance immatérielle, il fait son dieu spirituel ou immatériel ; il le fait immen-