Page:Holbach - Système de la nature, 1770, tome 2.djvu/55

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prises avec les ennemis qu’il s’étoit créés à lui-même ; malgré sa puissance infinie il ne voulut, ou ne put, totalement les réduire : jamais il n’eut des sujets bien soumis ; il fut continuellement occupé à lutter, à récompenser ses sujets lorsqu’ils obéissoient à ses loix, à les punir quand ils avoient le malheur d’entrer dans les complots des ennemis de sa gloire. Par une suite de ces idées, empruntées de l’état de guerre où les rois sont presque toujours sur la terre, il se trouva des hommes qui se donnèrent pour les ministres de Dieu, qui le firent parler, qui dévoilèrent ses intentions cachées, qui montrèrent la violation de ses loix comme le plus affreux des crimes ; les peuples ignorans reçurent ses decrets sans examen ; ils ne virent point que c’étoit l’homme, & non le dieu, qui leur parloit ; ils ne sentirent point qu’il devoit être impossible à de foibles créatures d’agir contre le gré d’un dieu que l’on supposoit le créateur de tous les êtres & qui ne pouvoient avoir d’ennemis dans la nature que ceux qu’il s’étoit lui-même créés. On prétendit que l’homme malgré sa dépendance propre & la toute puissance de son dieu pouvoit l’offenser, étoit capable de le contrarier, de lui déclarer la guerre, de renverser ses desseins, de troubler l’ordre qu’il avoit établi ; on supposa que ce dieu, pour faire sans doute parade de sa puissance, s’étoit fait des ennemis à lui-même, afin d’avoir le plaisir de les combattre, sans vouloir ni les détruire ni changer leurs dispositions malheureuses. Enfin l’on crut qu’il avoit accordé à ses ennemis rebelles, ainsi qu’aux hommes, la liberté de violer ses ordres, d’anéantir ses projets, d’allumer sa bile, de faire taire sa bonté pour armer sa justice. Dès lors on regarda tous les biens de cette vie, comme des