Page:Homère - Les dix premiers livres de l’Iliade trad. Salel 1545.djvu/82

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    Sur ſoy portoit, entre ceulx de ſa part,
Pour ce jour la, la peau d’ung Liepart :
L’Arc bien tendu, la Trouſſe bien peſante.
Pleine de traictz, ſon Eſpée luyſante :
Et deux beaulx dardz ſerréz, qu’il eſbranloit,
Quand les Gregeois au combat appelloit.
    Menelaus appercevant l’audace
De l’ennemy, qu’il recogneut en face :
Fut tout ſoubdain remply d’extreme joye :
Comme ung Lion, qui deſirant ſa proye,
Rencontre ung Cerf, ou Chevreul, dans les bois,
Mis par les chiens, & veneurs, aux Abois,
Si le devore, & en prend ſa paſture :
S’eſjouyſſant de tant bonne adventure,
Ainſi le Grec ayant Paris choiſy,
Sut en ſon cueur de lieſſe ſaiſy :
Voyant à ſoy l’occaſion offerte
De ſe venger de l’injure ſoufferte.
Et tout armé, comme il eſloit grand erre
Du Chariot feit ung ſault bas en terre.
    Adonc Paris qui bien cogneut venir
Menelaus, ne ſe peut contenir,
Et faire feſte, ayant ſon ame attaincte
Incontinent de merveilleuſe crainte,
Si recula : & craignant le danger,
Entre les ſiens retourna ſe renger.
Ne plus ne moins que faict l’homme paſſant,
Qui quelque fois les haulx montz tranſverſant,
(Sans y penſer) trouve ung Dragon en voye,
Dont tout craintif, ſe retire & deſvoye,
Paſle en couleur, de ſes membres tremblant :
Mieulx ung corps mort, qu’homme vif reſſemblant.