Page:Homère - Odyssée, traduction Leconte de Lisle, 1893.djvu/254

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d’intelligence, et, déjà, les peuples ne nous sont pas favorables. Hâtons-nous avant qu’il réunisse les Akhaiens à l’agora, car je ne pense pas qu’il tarde à le faire. Il excitera leur colère, et il dira, se levant au milieu de tous, que nous avons médité de le tuer, mais que nous ne l’avons point rencontré. Et, l’ayant entendu, ils n’approuveront point ce mauvais dessein. Craignons qu’ils méditent notre malheur, qu’ils nous chassent dans nos demeures, et que nous soyons contraints de fuir chez des peuples étrangers. Prévenons Tèlémakhos en le tuant loin de la ville, dans les champs, ou dans le chemin. Nous prendrons sa vie et ses richesses que nous partagerons également entre nous, et nous donnerons cette demeure à sa mère, quel que soit celui qui l’épousera. Si mes paroles ne vous plaisent pas, si vous voulez qu’il vive et conserve ses biens paternels, ne consumons pas, assemblés ici, ses chères richesses ; mais que chacun de nous, retiré dans sa demeure, recherche Pènélopéia à l’aide de présents, et celui-là l’épousera qui lui fera le plus de présents et qui l’obtiendra par le sort.

Il parla ainsi, et tous restèrent muets. Et, alors, Amphinomos, l’illustre fils du roi Nisos Arètiade, leur parla. C’était le chef des Prétendants venus de Doulikhios herbue et fertile en blé, et il plaisait plus que les autres à Pènélopéia par ses paroles et ses pensées. Et il leur parla avec prudence, et il leur dit :

— Ô amis, je ne veux point tuer Tèlémakhos. Il est terrible de tuer la race des Rois. Mais interrogeons d’abord les desseins des Dieux. Si les lois du grand Zeus nous approuvent, je tuerai moi-même Tèlémakhos et j’exciterai les autres à m’imiter ; mais si les Dieux nous en détournent, je vous engagerai à ne rien entreprendre.

Amphinomos parla ainsi, et ce qu’il avait dit leur plut. Et, aussitôt, ils se levèrent et entrèrent dans la demeure d’Odysseus, et ils s’assirent sur des thrônes polis. Et, alors,