Page:Homère - Odyssée, traduction Séguier, Didot, 1896.djvu/247

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La toile, que reçoit l’entrepont, et les rames
Fendent ensuite l’eau de leurs tranchants polis.
Moi, de mon fer je coupe un grand amas de cire,
Qu’en boules je pétris dans mes doigts vigoureux.
La substance mollit à l’effort chaleureux,
Comme aux rais du Soleil, le flamboyant Messire ;
Puis de tous mes guerriers j’en bouche les tympans.
Pour eux de pied en cap, au mât de la carène
Ils me tiennent lié de nœuds enveloppants ;
Après quoi l’aviron retord l’onde sereine.
Venus à la distance où peut s’entendre un son,
Nous ramons vite ; mais la couple charmeresse,
Découvrant notre marche, entonne une chanson :
« Viens, populaire Ulysse, étoile de la Grèce !
Arrête ton vaisseau pour savourer nos chants.
Nul encor n’a plus loin poussé sa coque noire
Avant d’avoir ouï des accords si touchants ;
Il en repart flatté, plus riche en sa mémoire.
Nous savons tous les maux qu’en la vaste Ilion,
Par le vouloir des dieux, Grecs et Troyens souffrirent ;
Et nous connaissons tout de l’humain tourbillon. »
Les magnifiques voix en ces termes soupirent.
Mon cœur est transporté, je fais signe à mes gens
De m’élargir : penchés, ils battent la mer glauque,
Cependant que, d’un bond, Périmède, Euryloque
Me chargent de liens encor plus exigeants.
Quand on a dépassé les chantantes merveilles,
Que l’on ne perçoit plus leurs sons vertigineux,
Mes comites chéris du creux de leurs oreilles
Ôtent la cire épaisse et détachent mes nœuds.

Presque au même moment, je vois de la fumée,