Page:Hope - L’Étoile des fées, trad. Mallarmé, 1881.djvu/24

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dre les autres heureux. Vous n’avez jamais fait l’expérience de cette félicité suprême, parce que jamais vous n’avez pris garde aux autres ; mais vous y parviendrez, si vous suivez mes instructions et supportez avec patience le malheur qui va vous frapper. Dès que vous entrerez dans votre chambre, vous serez aveugle… » — « Aveugle ! » s’écria la Princesse, pressant d’horreur ses mains contre ses yeux. — « Et votre cécité durera jusqu’à ce que vous ayez tout à fait banni la Fée Égoïste de votre présence, » continua, sans s’émouvoir, la splendide Fée. « Pendant votre affliction, vous aurez le temps de réfléchir, ce que vous ne faites point à présent. Vous sentirez ce que c’est que dépendre d’autrui pour mille petits actes de bonté, et le nombre vous apparaîtra de ceux que vous avez négligé d’accomplir. Les yeux ainsi plongés dans l’obscurité, votre esprit s’éclairera, votre cœur s’adoucira ; et, en recouvrant la vue, vous verrez d’un regard tout différent. Que votre devise soit dorénavant : Faire tout le bien qu’on peut, de toutes les façons qu’on peut, à tous ceux qu’on peut ; et cela aussi longtemps qu’on le peut. »

Le soupir poussé par la vieille n’était pas plus profond que celui qui, maintenant, s’échappa du sein de Blanche ; car, la première fois de sa vie, elle vit du chagrin pour elle en