Page:Houdar de La Motte - Œuvres complètes, 1754, tome 9.djvu/237

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LES DEUX LIVRES

J’ai vû quelquefois un enfant
Pleurer d’être petit, en être inconsolable.
L’élevoit-on sur une table ?
Le marmot pensoit être grand.
Tout homme est cet enfant. Les dignités, les places,
La noblesse, les biens, le luxe et la splendeur,
C’est la table du nain ; ce sont autant d’échasses,
Qu’il prend pour sa propre grandeur.
Je demande à ce grand, qui me regarde à peine,
Et dont l’acuëil même est dedain,
Qui peut fonder en lui cette fierté hautaine ?
Est-ce sa race, ou son rang, ou son train ?
Mais quoi ? De tes ayeux la mémoire honorable ;
L’autorité de ton emploi,
Ton palais, tes meubles, ta table,
Tout cela, pauvre homme ; est-ce toi ?
Rien moins ; et puisqu’il faut qu’ici je t’apprétie,
Un cœur bas, un esprit mal-fait,
Une ame de vices noircie
Te voilà nud, mais trait pour trait.
Du surplus ton orgueil te trompe et nous surfait.