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LABRADOR ET ANTICOSTI

aux-Anglais, on offrit à Monseigneur une jolie cloche d’une trentaine de livres, retirée de l’eau depuis quelque temps.[1]

Depuis le désastre de 1711 ; il y a eu, dit-on, quantité de naufrages sur l’île aux Œufs et la Pointe-aux-Anglais. L’érection d’un phare dans cet endroit dangereux en a clos la triste série.

* * *

Mercredi, 5 juin. — Monseigneur a terminé, ce matin, la mission de la Pointe-aux-Anglais. Il est décidé que nous partons aujourd’hui pour Saint-Patrice de la Pentecôte, distant d’ici de trois lieues. M. l’abbé Lemay, qui a là sa résidence, nous quitte pour nous y devancer. Il s’y rend à pied ! Il faut savoir que, durant la mission de la Pointe-aux-Anglais, il a déjà fait ce voyage, aller et retour, à pied aussi. — J’ai la plus vive admiration pour des prouesses de ce genre. Quant à nous, nous devons faire ce trajet en voiture ; car M. Langlois possède un cheval, qui est presque le seul de l’endroit. Mais le vent d’est ayant bien diminué et la mer n’étant pas trop mauvaise, nous partons dans l’après-midi par voie maritime, Monseigneur dans un canot, et moi dans l’autre. La mer était fort houleuse, mais ne brisait pas, excepté dans un seul endroit ; et j’ai le plaisir de pouvoir raconter que je courus là un véritable danger. Les lames nous prenaient de côté, ce qui avait pour résultat de nous bercer fort agréablement, lorsque tout à coup de la direction dont je viens de parler, nous vîmes arriver sur notre canot une vague très haute et déferlant déjà. Heureusement, celui des deux marins qui tenait la barre eut le temps de faire tourner un peu le canot, et nous prîmes obliquement cette vague dangereuse : sans ce mouvement très rapidement exécuté, la forte vague

  1. Cette belle cloche, qui n’a pas trop souffert d’un séjour de près de deux siècles au fond de la mer, est maintenant au musée du Séminaire de Chicoutimi. On y possède aussi une baïonnette très bien conservée, et une sorte d’écusson en cuivre, de forme ovale, portant le monogramme de la reine Anne surmonté de la couronne royale. Ces objets proviennent, comme la cloche, du naufrage de 1711.