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SHELDRAKE — RIVIÈRE-AU-TONNERRE

Il y a ici une jolie chapelle de 40 pieds sur 30, située sur une éminence, et dont l’intérieur n’attend plus que la peinture pour avoir apparence fort proprette. Il y a bien une cloche, mais pas de clocher, et le sonore airain, fixé sur un escabeau au coin de la façade, fait vraiment pitié à voir.

* * *

Je n’ai pas été peu surpris de trouver chez M. Touzel un jardin dont la végétation vigoureuse fait contraste avec ce que j’ai vu jusqu’ici sur la Côte. Les gadelliers y sont en pleine floraison ; les patates et les choux ont fort belle apparence. Quelques timides et modestes pensées se montrent çà et là. Mais l’on ne cultive presque pas les fleurs de pleine terre, par ici, tant le sol est pauvre et la saison courte. En revanche, il y a peu de maisons où l’on ne trouve pas quelques plantes d’appartement, surtout le Géranium dont le caractère accommodant se prête si bien à toutes les conditions possibles. En plusieurs endroits aussi, j’ai vu en pots, sur les fenêtres, des plantes annuelles, balsamines, œillets d’Inde, etc. Les Canadiennes aiment tant à cultiver les fleurs ! Je soutiens la thèse que ce goût de la floriculture est l’un des signes les plus certains des mœurs policées et des goûts artistiques de notre race ; et je n’opposerais pas d’autre argument à nos détracteurs de la « race supérieure » anglaise et américaine.

On cultive un peu l’avoine à Sheldrake, mais elle y mûrit difficilement. On la conserve comme fourrage vert pour les bestiaux.

Champs et jardins prospèrent tout à fait sans autre engrais que le varech qu’apportent les flots sur le rivage ; mais ce que la mer en apporte ici n’est pas suffisant. On n’a donc, en général, d’autres ressources que d’utiliser le capelan et le lançon, dont il y a tant que l’on en veut, et les têtes de morue. On parsème, de ces petits poissons et de ces têtes de morues, la surface du sol, et tout est dit. S’il n’y a plus rien à dire, par exemple il y a à