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Page:Huard - Labrador et Anticosti, 1897.djvu/204

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LABRADOR ET ANTICOSTI

Un peu à l’ouest de la Longuepointe, commence une suite d’îles plus ou moins considérables qui longent la côte du golfe jusqu’au détroit de Belle-Isle. Les îles aux Perroquets, au nombre

    la pêche à la morue, à Terre-Neuve. Je les extrais d’un article intitulé : La pêche sur le grand Banc de Terre-Neuve, publié dans le Cosmos du 28 septembre 1895 :

    « La plupart des navires partis de France viennent d’abord toucher à Saint-Pierre. Ils y font de l’eau, des vivres, achètent le hareng nécessaire à la première pêche, et débarquent leurs passagers ; car la plupart sont chargés d’un grand nombre de graviers (on appelle ainsi les journaliers employés aux sécheries de morue sur les graves de Saint-Pierre), ou bien ils transportent les équipages des bateaux qui arrivent directement dans ce port pour aller faire la pêche sur le French-Shore ou sur les bancs.

    « Au mois de juin, tous les navires se réunissent à Saint-Pierre pour y renouveler leur provision de bouette, sauf ceux qui, comme nous le verrons plus loin, se bouettent eux-mêmes sur le grand Banc. Cette fois, c’est du capelan que l’on embarque, et ce poisson est fourni comme le hareng par les habitants anglais de la côte sud de Terre-Neuve,

    « Les navires pêcheurs de la métropole, ou bancquiers, s’établissent en pêche à peu près sur toutes les parties du grand Banc ; ils pêchent assez rarement sur le Banc de Saint-Pierre, et plus rarement encore sur le Banc-à-Vert. Les goélettes de Saint-Pierre pêchent, généralement sur le Banc de Saint-Pierre en vue des îles ; quelques-unes vont sur le grand Banc ou sur le Banquereau. (Amiral Cloué.)

    « La pêche ne se fait pas du bord même, comme en Islande, mais dans des embarcations spéciales.

    « Ces embarcations à fond plat, ayant environ de 5 à 6 mètres de long, s’appellent des doris. Autrefois, l’on employait pour la pêche des chaloupes creuses ayant environ 7 mètres de quille que l’on appelait chaloupes du banc. Il y a une cinquantaine d’années qu’on leur a substitué les doris, qui, beaucoup plus légères, chargent moins les navires, se hissent et s’amènent à bord très facilement. Ce sont cependant de mauvaises embarcations, destinées primitivement à la pêche le long des côtes où on peut les haler très facilement au sec par mauvais temps. Leur forme les rend très instables, et il faut toute l’habileté et la hardiesse de nos matelots pour qu’elles puissent tenir la mer comme elles le font, même par gros temps.

    « La pêche se fait au moyen de grandes lignes connues sous le nom de palangres ou d’harouelles, armées sur toute leur longueur d’une série d’hameçons. Avec les anciennes chaloupes du banc, qui étaient creuses et profondes, quelques-unes de ces lignes avaient jusqu’à 6 milles, soit 11 kilomètres de long. Aujourd’hui, avec les doris qui sont beaucoup plus petites, elles ne dépassent guère 2000 ou 3000 mètres.

    « Le navire bancquier, étant à l’ancre sur les fonds de pêche, envoie de chaque côté ses doris mouiller les lignes, généralement le soir, à partir de quatre heures. Les doris reçoivent les lignes lovées et bouettées dans des mannes, et les élongent en s’éloignant du bord. L’extrémité de la ligne est marquée par une bouée surmontée d’une gaule. Le lendemain matin, on vient relever les lignes en commençant par l’extrémité en large. (Pilote de Terre-Neuve.)

    « Souvent, si le temps est beau, après avoir tendu les lignes, les pêcheurs restent sur leur extrémité jusqu’au lendemain matin, pour s’éviter la peine d’un double voyage ; alors, si le temps devient mauvais pendant la nuit, ils se trouvent compromis loin de leur navire, et ne peuvent pas toujours rentrer à bord.

    « Qu’on se figure, dit l’amiral Cloué, sur une mer violente comme celle des bancs, des embarcations non pontées, chargées souvent outre mesure, sur lesquelles s’exposent des hommes qui n’ont pas seulement à craindre les périls de l’aller et du retour, mais encore ceux du débarquement et du rembarquement ! La brume est aussi une cause qui écarte les chaloupes de leur bâtiment, au point qu’elles le perdent quelquefois tout à fait. Trop heureux sont alors ceux qui les montent, s’ils peuvent relâcher à bord de quelque autre navire pêcheur ; il en est qui parviennent à rallier la côte de Terre-Neuve ou même Saint-Pierre, mais combien se perdent complètement ! Que de sinistres enregistrés chaque année ! Que de familles dans le deuil et dans la misère ! Il faut avoir vu ces vigoureux matelots à l’œuvre sur les fonds de pêche, pour avoir une idée du rude métier qu’ils font par des temps où l’on n’aurait jamais pu supposer qu’une embarcation put tenir la mer. (Ibid.) »

    — Dans ces dernières années on a commencé, à bord des goélettes américaines et françaises, à se servir de bouette conservée dans de la glace. On emporte ainsi de la bouette pour une douzaine de jours.