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le recevoir et continua à dérouler gravement, entre ses doigts les grains de son chapelet. Le Chakdja, sans s’émouvoir ni de la chute de son bonnet ni du froid accueil qu’on lui faisait, entra brusquement eu discussion. Il fit un pompeux éloge des rites anciens, et étala tous les droits qu’il avait à la prééminence. Tsong-Kaba, sans lever les yeux, l’interrompit en ces termes : — Rends la liberté, cruel que tu es, rends la liberté à cette pauvre créature que tu tords entre tes doigts. J’entends d’ici ses gémissements et j’en ai le cœur navré de douleur. — Le Chakdja, tout en prônant son propre mérite, avait en effet saisi sous ses habits un insecte dont la piqûre l’importunait, et au mépris de la doctrine de la métempsycose, qui ordonne de respecter la vie de tous les êtres, il cherchait à l’écraser dans ses doigts. Ne sachant que répondre aux sévères paroles de Tsong-Kaba, il se prosterna à ses pieds et reconnut sa suprématie.

Dès ce moment les réformes proposées par Tsong-Kaba ne trouvèrent plus d’obstacles ; elles furent adoptées dans tout le Thibet, et dans la suite elles s’établirent insensiblement dans les divers royaumes de la Tartarie.

Pour peu qu’on examine les réformes et les innovations introduites par Tsong-Kaba dans le culte lamaïque, on ne peut s’empêcher d’être frappé de leur rapport avec le catholicisme. Nous avons déjà parlé du gouvernement du grand lama, qui présente de singulières analogies avec celui des États pontificaux. Durant notre séjour parmi les bouddhistes du Thibet nous avons remarqué en outre la crosse, la mitre, la dalmatique, la chape ou pluvial, que les lamas