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somme importante que lui devait une princesse de ces contrées. Nous avons oublié de dire qu’en traversant le royaume de Lahor, le P. Goès avait rencontré une reine musulmane qui revenait de faire un pèlerinage à la Mekke. Ayant été détroussée par les voleurs, elle était, avec les gens de sa suite, réduite aux dernières extrémités et dans l’impossibilité de pouvoir regagner ses États. Le P. Goès, ému de compassion, avait mis généreusement à son service les ressources dont il pouvait disposer, espérant que la loyauté musulmane saurait apprécier le dévouement et la charité du missionnaire catholique. Peu de jours après son arrivée à Yarkand, le P. Goès, ayant confié ses bagages à son compagnon Izaac, s’était mis à la recherche de cette princesse, mère du roi de Khatan[1].

Un mois s’était déjà écoulé, et Goès n’avait pas encore reparu à Yarkand. On répandait le bruit qu’il avait été massacré dans le Khatan par de fanatiques musulmans, qui, furieux de ne pouvoir le contraindre à rendre hommage à Mahomet, l’avaient mis en pièces. Ces nouvelles plongèrent dans la désolation le pauvre Izaac ; il était inconsolable de la perte de son maître et passait les journées entières à verser des larmes. Les religieux bouddhistes de Yarkand étaient au contraire dans la joie, parce que, d’après les usages du pays, ils étaient héritiers des marchandises et des bagages des voyageurs qui mouraient dans leur ville, sans y avoir de parents. Mais l’arrivée subite de Goès vint tout à coup tarir les larmes d’Izaac et arrêter la cupidité de ses prétendus héritiers. Son

  1. Province du Turkestan.