Page:Huc - Le christianisme en Chine, en Tartarie et au Thibet, tome 2.djvu/257

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sion qu’un frère coadjuteur chargé de pourvoir à sa nourriture, tandis qu’il parcourait en apôtre les villes et les campagnes. Il opéra des conversions si nombreuses, que la jalousie des bonzes lui suscita de violentes persécutions ; il se vit même poursuivi par les accusations et les calomnies les plus injurieuses ; il se présenta devant les magistrats, convainquit ses ennemis de mensonge, et eut la générosité de leur pardonner. La sagesse, la patience et la force d’âme qu’il avait montrées dans l’exercice de son ministère avaient tellement frappé le P. Ricci, qu’il n’avait pas hésité à le désigner pour son successeur.

Le P. Lombard, plein de respect et d’admiration pour la mémoire du fondateur de la mission, n’accepta pas cependant toutes les appréciations du P. Ricci sur les doctrines philosophiques et religieuses des Chinois. Le P. Ricci, dès son début dans l’apostolat, après avoir étudié le caractère et le génie de la nation qu’il était appelé à évangéliser, avait pensé que le moyen le plus sûr d’amener les Chinois à la vérité était de souscrire en partie aux éloges que la nation et le gouvernement ne cessent de donner à Confucius, regardé comme le sage par excellence, le maître de la grande science et le législateur de l’empire. Il crut avoir découvert que la doctrine de ce philosophe sur la nature de Dieu se rapprochait beaucoup et ne différait pas essentiellement de celle du christianisme ; que le Tien ou Ciel, préconisé par les lettrés, n’était point le ciel matériel et visible, mais le vrai Dieu, le Seigneur du ciel, l’Être suprême, invisible et spirituel dans son essence, infini dans ses perfections, créateur et conservateur de toutes choses ; le seul Dieu, enfin,