Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 1.djvu/60

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Samdadchiemba alla rincer le chaudron sur les bords de l’étang. Bientôt, pour compléter la fête, nous fîmes bouillir le thé mongol. Le thé dont usent les Tartares mongols n’est pas préparé de la même manière que celui qui est consommé par les Chinois. Ces derniers, comme on sait, se servent, en général, des feuilles les plus petites et les plus tendres, qu’ils font simplement infuser dans l’eau bouillante, de manière à lui donner une teinte dorée. Les feuilles grossières, auxquelles se trouvent mêlées les branches les plus déliées, sont pressées et coagulées ensemble dans un moule, où elles prennent la forme et l’épaisseur des briques qui sont en usage dans la maçonnerie. Ainsi préparé, on le livre au commerce sous le nom de thé tartare, parce qu’il est presque exclusivement employé par ce peuple, si on en excepte toutefois les Russes, qui en font une grande consommation. Quand les Tartares veulent faire le thé, ils cassent un morceau de leur brique, le pulvérisent, et le font bouillir dans leur marmite, jusqu’à ce que l’eau devienne rougeâtre. Ils y jettent alors une poignée de sel, et l’ébullition recommence. Dès que le liquide est presque noir, on ajoute plein une écuelle de lait, puis on décante dans une grande urne cette boisson qui fait les délices des Tartares. Samdadchiemba en était enthousiaste ; pour nous, nous en buvions par nécessité, et faute de mieux.

Le lendemain, après avoir roulé notre tente, nous nous éloignâmes de cet asile où nous avions demeuré quelques heures. Nous le quittâmes sans regret, parce que nous l’avions choisi et occupé sans affection. Cependant, avant d’abandonner cette terre hospitalière, sur laquelle nous