Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 2.djvu/233

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Thibétain reçut le cadeau du chef de brigands, et lui offrit en retour un arc et un carquois magnifiques qu'il avait achetés à Péking.

Les Kolo qui étaient restés hors du camp, voyant que leur maître avait fraternisé avec le chef de la caravane, mirent pied à terre, attachèrent leurs chevaux deux à deux par la bride, et vinrent boire amicalement le thé avec les pauvres voyageurs, qui commençaient, enfin, à respirer à leur aise. Tous ces brigands furent extrêmement aimables ; ils demandèrent des nouvelles des Tartares-Kalkhas qu'ils attendaient spécialement, disaient-ils, parce que l'année précédente, ils leur avaient tué trois hommes qu'il fallait venger. On fit aussi un peu de politique. Les brigands prétendirent qu'ils étaient grands amis du Talé-Lama, et ennemis irréconciliables de l'empereur de Chine ; qu'à cause de cela, ils manquaient rarement de piller l'ambassade quand elle se rendait à Péking, parce que l'Empereur était indigne de recevoir les présents du Talé-Lama, mais qu'ils la respectaient ordinairement à son retour, parce qu'il était très-convenable que l'Empereur fit des cadeaux au Talé-Lama. Après avoir fait honneur au thé et au tsamba de la caravane, ces brigands nous souhaitèrent bon voyage et reprirent le chemin de leur campement. Toutes ces fraternelles manifestations ne nous empêchèrent pas de dormir avec un œil ouvert. La nuit ne fut pas troublée, et le lendemain nous continuâmes en paix notre route. Parmi les nombreux pèlerins qui ont fait le voyage de Lha-Ssa, il en est fort peu qui puissent se vanter d'avoir vu les brigands de si près, sans en avoir reçu aucun mal.

Nous venions d'échapper à un grand danger ; mais il